Une Pêche Mémorable : Entre Ghosts et Koïs, une Session Inoubliable
Il y a déjà une semaine que notre coéquipier Arnaud Lips nous a temporairement quittés pour entreprendre un long voyage en Australie qui durera plusieurs années. Bien entendu, il était impensable pour nous de ne pas profiter d’une dernière partie de pêche ensemble.
Nous avons décidé de pêcher une section de rivière que nous n’avions pas visitée depuis plusieurs années. J’ai commencé à amorcer quotidiennement avec 5 kg de bouillettes.
Au fil des jours, j’ai remarqué de plus en plus de poissons chaque matin, ce qui m’a poussé à doubler la quantité d’amorçage.
Lors du dernier jour d’amorçage, j’ai observé plusieurs petites carpes communes et une carpe “ghost”.
Puis, comme surgie de nulle part, j’aperçois un poisson plus imposant que j’estime à environ 13-15 kg.
L’eau étant trouble, il était difficile de distinguer clairement les poissons.
Je décide de les observer depuis un endroit plus élevé et je me rends compte qu’il s’agit d’une magnifique carpe koï orange et noire. Je n’ai pas besoin de vous expliquer l’excitation que j’ai ressentie à ce moment-là.
Sans attendre, j’envoie à Arnaud une courte vidéo du poisson pour l’exciter davantage en prévision de cette dernière partie de pêche que nous souhaitons mémorable. Et pour ma part, peut-être même plus ! J’avais clairement envie de réaliser une performance exceptionnelle.
Nous n’avons que 48 heures de pêche, donc le temps nous est compté.
De plus, c’est notre première session de l’année sur cette rivière et nous n’avons pas d’autres informations que celles datant de quelques années.
Le jour J, la pêche commence mal avec un fort courant qui ne permet que deux de nos cannes de pêcher correctement.
Arnaud a rapidement une touche, mais il perd une petite carpe près du bord. Quant à moi, je capture une grosse carpe commune tard dans la nuit.
Au petit matin, nous avons l’impression d’avoir manqué notre pêche.
Nos seules cannes productives sont à nos pieds. J’observe discrètement une carpe “ghost” et quatre petites carpes communes qui se nourrissent près de ma canne, lorsque soudain Arnaud a une touche quelques dizaines de mètres plus loin.
Je me précipite pour l’aider et je réussis à épuiser une belle carpe “ghost” d’environ dix kilos. C’était incroyable, deux carpes “ghost” à quelques mètres l’une de l’autre en train de se nourrir !
Je profite de l’occasion pour lui raconter la scène qui se déroule sur ma canne, puis je retourne derrière ma canne dans l’espoir de… Et là, c’est le même scénario, la carpe “ghost” dévore mon amorçage, je la vois même avaler mon appât à deux reprises avant de le recracher.
Je suis fou de joie, je filme la scène avec mon téléphone portable et j’ai ma main prête à ferrer. Mais hélas, la carpe “ghost” s’en va tranquillement après avoir pillé mes derniers appâts.
Même si nous avons déjà capturé une carpe “ghost” et une belle commune, nous avons toujours le sentiment d’avoir raté notre pêche.
Nous sommes donc au petit matin de notre première nuit avec deux belles carpes, mais ce sentiment persiste.
Je passe la matinée à observer des dizaines et des dizaines de petites carpes communes à proximité de ma seule canne productive.
Malheureusement, je n’arrive pas à en capturer une seule. Les poissons sont clairement présents, mais il est évident pour nous que quelque chose ne va pas. L’idéal serait de pêcher 30 mètres plus à gauche de notre poste, mais dans cette jungle, il n’y a pas vraiment de poste défini.
La matinée passe rapidement et nous n’avons toujours pas réussi à rassasier notre soif de carpes. À midi, notre envie de viande remplace progressivement notre envie de carpes.
C’est le minimum syndical pour deux grands gaillards comme nous. Après un copieux repas, nous décidons de changer de poste, en créant un nouvel emplacement quelques mètres plus bas.
Nous nous lançons alors dans une galère sous un soleil de plomb, avec un bon kilo de viande chacun dans l’estomac. Autant vous dire que ma motivation n’était plus au rendez-vous. À 17 heures, nous nous installons précairement parmi les roseaux, sur une vase à peine séchante malgré les 28 degrés qui nous assèchent et brûlent notre peau.
Après un petit apéro sympathique, nous disposons trois cannes chacun sur une petite zone calme, à la limite du fort courant.
Le niveau d’eau a baissé d’une quinzaine de centimètres et le débit est passé de 100 à 80 m³ par seconde. Logiquement, la pêche devrait s’améliorer.
Au petit matin, le constat est amer. J’ai touché deux silures et une carpe de deux ou trois kilos. Tous nos efforts de la veille n’ont pas porté leurs fruits.
Je suis profondément déçu de cette pêche, qui n’était clairement pas à la hauteur de ce que j’avais pu observer pendant les amorçages précédents.
Résignés, nous décidons de plier bagage directement après notre petit-déjeuner. Les poissons sont toujours dans la zone, et Arnaud nous prépare un dernier festin avec ce qu’il nous reste de provisions. Nous avons besoin de forces pour surmonter notre déception.
À peine nos forces reprises, l’une de mes cannes s’emballe. C’est une belle carpe commune d’environ 20 kilos.
Quelques minutes plus tard, Arnaud a également une touche et enchaîne avec une autre commune de 16 kilos. Il est 9h30, l’heure à laquelle nous devions initialement plier. C’est également à peu près l’heure à laquelle je commençais mes amorçages chaque matin.
Nous nous motivons alors à pêcher encore une petite demi-heure, qui se transforme en plusieurs heures, car les touches s’enchaînent à une vitesse folle, avec des carpes de taille plus modeste.
Il est déjà 14 heures et nous commençons à avoir faim. En réalité, nous crevions déjà de faim dix minutes après notre petit-déjeuner, mais c’est maintenant l’heure de remballer.
Je commence à ranger quelques affaires tandis qu’Arnaud a de nouveau une touche. Je m’approche avec l’épuisette et je lui fais remarquer que c’est mon tour de faire le poisson, car nous partageons chaque départ lors de nos sessions de pêche ensemble.
Il me tend la canne et je lui souris en lui disant que j’ai déjà capturé deux beaux poissons, alors il devrait garder la canne cette fois-ci.
Il insiste pour me la donner, mais je refuse en lui disant qu’il devrait la garder car j’ai aperçu un joli reflet de koï. Nous rions tous les deux, ne sachant pas encore quelle surprise nous réserve cette canne.
Cependant, je pensais avoir aperçu une belle commune avec une robe dorée sous le soleil de plomb. Deux minutes plus tard, je vois le poisson passer à quelques mètres de l’épuisette.
Stupéfaction !
C’est une véritable koï ! C’est la grosse koï que j’avais aperçue l’autre jour ! Je suis en état de stress intense jusqu’au moment où j’arrive enfin à épuiser ce poisson hors du commun. Nous sommes comme deux enfants découvrant leurs cadeaux de Noël, les yeux brillants devant cette carpe exceptionnelle posée sur notre tapis de réception.
Capturer un tel poisson en rivière est quelque chose d’incroyable ! Arnaud est fou de joie et me confie que c’est sa première koï.
Rapidement, je m’applique à immortaliser cet instant, afin que nous puissions garder le plus de souvenirs possibles de ce moment qui marque la fin de notre dernière pêche ensemble avant son départ pour l’Australie, sans savoir quand il reviendra.
Notre pêche ne pouvait pas se terminer autrement que sur une note positive, et nous sommes tous les deux comblés.
Cependant, une pointe de tristesse s’installe en nous, car il est temps de se dire au revoir après cette si belle pêche.
Comme à mon habitude, je ne manque pas de le taquiner en lui disant qu’il peut encore annuler son voyage pour que nous puissions continuer à pêcher les carpes de la rivière ensemble. Nous prenons la route du retour, savourant cette session d’exception.
Vivre une pêche où nous avons capturé une carpe “ghost” et une koï dans la même session en rivière est un exploit que je pense seul au monde à avoir réalisé. Je suis extrêmement fier d’avoir pu partager cet événement avec Arnaud.
Une fois chez moi, il est temps de se dire au revoir. Son départ est prévu dans quelques jours et nous ne savons pas si nous aurons l’occasion de nous revoir avant son départ.
Voilà, notre histoire se termine sur des moments gravés à jamais dans notre vie de pêcheurs, mais mon cœur est lourd quand je lui dis au revoir. J’ai déjà hâte qu’il revienne pour revivre ce genre de moments ensemble.